Il venait de se faire couper en deux, pas volontairement, il était dans un état bizarre: il arrivait plus à respirer. Parmi ceux qui l'entouraient y en a un ou deux plus vieux qui rigolaient: souffle coupé, respiration, c'est pas grave, ça va revenir - l'attaquant lui était rentré dans le bide, il était tombé sur le dos, tout simple. Oui, tout simple, mais qu'est-ce qu'il avait peur. Trente secondes plus tard la joie de vivre et de respirer normalement, putain, mais quelle panique, avant cette joie: je vais crever, je vais crever, je vais crever. C'était sûr il allait crever. Et puis non.
ça fait bizarre, hein?
L'entraîneur a dû bouger de trois mètres: on reprend ses places, on recommence. En hurlant. Comme d'hab. Allez, les yeux qui piquent, le sable,
repartir en courant.
Le soir en rentrant: c'était bien l'entraînement?
Ouioui
Et tu as fait tes devoirs?
Ouioui.
Va laver tes chaussettes, elles puent.
Oui Maman.
Sa mère voulait bien qu'il fasse du foot, elle était pour, mais hors de question de laisser ces 4 puanteurs, l'hiver il superposait toujours deux paires, longues et horribles, au sale pour contaminer le reste, et hors de question qu'elle les lave. Elle avait des idées sur la répartition des tâches hommes/ femmes qui n'étaient pas les mêmes que celles de ses copains et des parents de ses copains. Il leur disait pas.
Lave-les à la main tu vas encore niquer la machine avec ces graviers de merde.
Le gravier rouge du stabilisé.
Les deux chaussettes d'une des deux paires étaient complètement trouées au talon. Les deux autres n'allait pas tenir longtemps.
On mange quoi?
Elle faisait super bien à bouffer, quand ça lui prenait.
Chez son père c'était plus cool il mangeait des pizzas et les chaussettes il les mettait au fond de la chambre, elles puaient quelques temps et puis il les mettait dans le lave linge. Chez son père il en avait trois paires, ça suffisait pour la semaine et puis il les remettait sales, il s'en foutait, s'il allait jouer avec des potes. L'entraînement il avait bien compris qu'il fallait y aller propre, sa mère voulait presque qu'il se lave avant. Et qu'il se relave après.
Il détestait se laver mais quand son père lui avait dit: ta mère, elle me dit que tu fais semblant de te laver; ça m'emmerde qu'elle m'appelle, qu'elle m'emmerde avec ça mais ça va être simple: si je vois qu'après la douche tu pues, ou si elle me dit que chez elle, après la douche tu pues, je rentre dans la salle de bain pendant que tu y es et je te défonce à coup de claques. Et interdiction de mettre du déo ou du parfum. Maintenant le déo et le parfum tu les mets dans ta chambre et tu les mettras dans ta chambre, après la douche. Et je te renifle quand tu sors de la salle de bain, et déjà ça, ça me plaît pas comme idée.
... tu les mets dans ta chambre... tu les mets dans ta chambre... tu les déposes dans ta chambre... je veux plus les voir dans la salle de bain...et après la douche tu retournes dans ta chambre et tu mets ton déo... tu te le passes... Tu le fais.
Il savait pas si c'était une bonne chose ou pas mais il avait tendance à croire son père.
Et puis il s'était rendu compte que c'était beaucoup plus rapide de se doucher que de faire semblant en se laissant couler de l'eau bouillante dessus en attendant qu'il se passe quelque chose.
Le match est dans trois heures et il pense à ça.
Il va avoir X dans sa zone de marquage et X est hyper fort mais c'est surtout que c'est un putain d'enculé, qu'il va passer son temps à l'insulter à voix basse et à lui filer des petits coups à la con, il est vif et c'est une caisse. bref l'enfer. Mais après, lui aussi il est fort et il le fait deux fois, il commence à être un peu connu dans le quartier et il sait que X, c'est possible, il est en train de se chier dessus. Si il me passe pas entre les jambes ça va.
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