jeudi 11 septembre 2014

STU 3+1=2+2=4?



Un groupe d'amis, de musiciens, de familiers, une nation, est composé de sous groupes.
Et de sous-hommes parfois. Mais pas toujours.
Dans le Stu il y a quatre individus.
Qui ont des liens, des affinités, des histoires communes qui les rapprochent particulièrement: 4 personnes parfois c'est 2 potes plus 2 autres potes; 4, parfois, c'est trois potes au bar et un couillon tout seul chez lui. Ou trois personnes chez elles et un beau gosse au bar avec des filles plein sa table - ou des larmes plein sa voix et de la pisse plein sa bière parce que sa brelle démarre pas.

Une fois, c'était un lundi, je suis rentré dans le local. Ils étaient déjà deux, on devait répéter à trois, mais ils étaient venus plus tôt, les petits complices. Le quatrième bossait et ne venait pas ce soir. En frappant à la porte, toujours fermée à clef, j'ai pensé à un couple - un peu bizarre certes, un couple rythmique soit dit en passant - que je dérangeais presque. Puis, moi étant là,  à une sorte de famille -un peu dégénérée - dans laquelle je suis entré comme un... un fils aîné dont le frère cadet était en colo de vacances. J'étais qu'avec mon papa et ma maman, c'était bien, c'était facile, y'avait que trois sons à mélanger, trois personnalités, pas quatre.
Et puis surtout quand quelque chose va pas on sait tout de suite que c'est la faute de celui qu'est pas là et c'est simple, et on l'accuse, et on est content. Je crois que l'empire américain fonctionne à peu près de cette façon.
Et puis votre frère vous manque.
Et puis souvent on se dit que si ça va pas c'est justement parce que le quatrième n'est pas là...
Alors que lorsqu'on est tous les quatre il est clair que ça va pas et que c'est tout simplement la réalité...
_Vous pouvez au moins faire semblant de me rocknrolliser votre soupe, là?
_ Oui. Oui. (Quand t'es viré tu payes quand même la séance.)
Alors, 2+2=3+1=4?
Deux au milieu de quatre: j'ai connu Manu au lycée. Manu et moi. J'ai connu Guillaume au collège, Guillaume et moi. Manu et Christophe ont la peau mate et des origines espagnoles. Christophe et Manu. Guillaume et Christophe ont écouté JoysDivision à douze ans. Que dis-je à onze ans. Christophe et Guillaume. Guillaume et Manu ont croisé le fer. Guillaume et Manu. Plein de combinaison de deux...
_ Mais merde, vous avez entendu ce que j'ai dit...
_ Oui. Et bien Christophe et moi on jette des trucs à la gueule des gens, et souvent dans nos gueules à nous, pas souvent, mais on le fait.
Un soir, en répète, il m'énerve, je l'énerve, l'alcool nous énerve, il veut parler, ça fait longtemps qu'il parle me semble-t-il, je l'interromps, il se vexe, il me fait un bras d'honneur, je commence à shooter dans tout ce qui bouge en le visant pour lui faire ravaler son geste, un tabouret de batterie lui frôle le visage et se fracasse sur le mur, on a un peu peur, on se serre la main.
_ ...
C'est pas tout. Quelques semaines plus tard, dans un bar, Christophe et Manu se disputent, Manu doit insulter Christophe ou s'en moquer, Christophe prend sa bière et la lui jette dans la gueule pour lui faire ravaler ses propos. Le verre frôle le visage de Manu et se fracasse sur mon épaule, on se serre la main.... Nous formons un beau groupe de deux, ceux qui jettent des trucs.
A noter qu'on peut considérer que Guillaume en balançant un jour des bouteilles de bière par la fenêtre nous ait rejoint, voire nous ait fait fermer notre gueule.
_ C'est tout?
_ Et bien Christophe et Guillaume se roulent des pelles, de façon ostensible, souvent après des concerts. Le premier dit que c'est pour lui casser tous ses coups, l'autre dit qu'il est pris en otage mais tous deux savent que c'est pour être deux fois plus sexy... Christophe et Manu sont tatoués, peau sombre, boucles d'oreilles et crêtes (alors que Guillaume et moi avons longtemps plaqué une petite raie de côté au dessus de nos lunettes, c'est beaucoup plus séduisant.)
_ Bon, allez, groupes de 3 dans groupe de 4, un exemple, et après vous vous cassez.
_ ...
_Vite.
_On est allé jouer à Bordeaux, une date sèche, en partant de Marseille, faut être un peu con pour faire ça. En Xsara, pleine à craquer. Il pleuvait, on a crevé sur l'autoroute, quelqu'un a dû faire tomber un ampli sur le pied de quelqu'un pour aller chercher la roue de secours. On arrive très tard à Bordeaux mais on se rend compte qu'on joue dans une Rhumerie et que le bar est gratuit -à l'infini- pour nous. Manu nous attrape par le col, Christophe et moi: "Guillaume ne doit jamais savoir que le bar et surtout les coktails au rhum sont gratuits." On applique. On boit nos rhums en cachette, on fait semblant de lui offrir une bière ou deux. On joue (Guillaume joue mieux que nous, va savoir pourquoi.) On range le matériel, je rejoins Guillaume au bar: je le vois en train de sortir des billets, je lui demande ce qu'il fait, il me répond: "je vais me payer un petit rhum", j'éclate de rire, je lui apprends, il est outré. Il en boit quatre ou cinq cul sec et fonce dans la salle où commence le concert suivant et...
_ Associez, associez...
_ Ben oui, on est associés, bien sûr qu'on est associés, on est plus qu'associés, on est...
_ Bon allez, cassez-vous.

10..+ 10...+ 10... + 10... et voilà 40 euros dans la main du pédopsychiatre.
_ Et j'ai oublié de dire que oui, 4, oui 3+1= 2+2= 4, que 4 c'est...
_ C'est bon, vous avez payé, c'est fini, vous rentrez chez vous, chez votre papa... ou votre maman, ou appelez-les comme vous voulez... vous partez.

jeudi 4 septembre 2014

(STU)

Une parenthèse. "Ecrit de réconciliation."
Il y a 6 ans, peut-être, avec Manu et Christophe nous avons monté, fait, écrit, je sais pas, un petit journal, un fanzine dont le premier titre était "Les chiens enragés"-ce titre grandiloquent et naïvement, prétentieusement, enfantin me semblait parfait mais comme il préexistait à notre trio, Manu l'ayant pensé, rêvé, joué avant de nous rencontrer, nous avons ensuite réellement baptisé cette feuille de chou, moitié leggins et moitié teck, "Courts Outrages". C'était une bonne décision, c'était un bon titre, choisi pour de bonnes raisons, que j'assume et revendique tout ce que vous voulez mais j'ai toujours préféré, même si tous les arguments pour le congédier étaient bons, et sûrement préféré à tort en plus, enfin j'ai toujours préféré : "Les chiens enragés". La vie est rigolote.
Mais il s'agit là d'une parenthèse dans la parenthèse.
Dans ce journal j'écrivais une rubrique, intelligemment soufflée à mon oreille par Manu, qui s'appelait "Manuel de guitare personnel" dans laquelle je racontais mon difficile, problématique, tardif, douloureux, mais aussi joyeux, ouais quand même un peu, apprentissage de la guitare. J'en profite pour dire que je l'avais intitulée, cette rubrique, "Manuel de..." pour faire le lien, et payer ainsi cette petite dette, que moi-seul peut-être voyait, avec le prénom de celui qui me l'avait soufflée (qui est d'origine espagnole comme Manuel V. et non d'origine allemande comme Emmanuel K.)
Mais il s'agit encore d'une parenthèse dans la parenthèse.
Dans le "Manuel de guitare personnel" je racontais les rapports, entre autre conflictuels, que je pouvais avoir avec l'apprentissage de cet instrument, lié aux rapports éventuellement complexes mêmes si souvent banals, que je pouvais entretenir avec ma famille (relativement musicienne, notamment mon père, plutôt guitariste.)
Un peu comme si, affirmation auto polémique et auto parodique, Christian Bach, le fils de Jean-Sébastien, décrivait son apprentissage de la musique.
Or, à partir du moment où je racontais cela dans ce journal vaguement, très vaguement, diffusé, c'est qu'"il n'y avait plus de problème", que le "problème" n'était pas forcément réglé mais qu'il ne se posait plus dans les termes dans lesquels je l'exposais.
Ce qui fait que je suis toujours surpris quand on me dit que je peux avoir des "problèmes" liés à la guitare -j'en ai bien sûr, j'en ai presque avec tout, héhé- tels qu'ils sont formulés dans le "Manuel de guitare personnelle": je n'en ai plus la mémoire puisque je l'ai écrit et je peux répondre sans me forcer et sans mauvaise foi: "ha bon?"
Mais surtout il me semble que j'ai pu écrire ces "articles" parce que je n'étais plus en conflit avec ce que j'y racontais, relativement réconcilié: qu'il s'agisse d' articles du journal, d'articles de blog, de paroles de chanson... de ce que vous voulez, cela n'a strictement rien à voir avec un journal intime. Ainsi les douloureux conflits non réglés, à cet instant même aussi, liés à l'apprentissage de la guitare il me semble ne jamais en avoir vraiment parlé si ce n'est ivre mort peut-être ou à un psy, à jeun... c'est pour cela que quelle que soit leur apparence ou leur tonalité, ces écrits je les ai appelés -première ligne de cette page- des écrits de réconciliation...
ça (J'arrive pas à faire un ç majuscule) sonne peut-être pas trop mal mais je sais pas vraiment ce que ça veut dire en fait : "écrit de réconciliation"...
Disons que quand je montre quelque chose que j'ai écrit c'est que je suis réconcilié avec ce que j'ai écrit, qu'éventuellement le fait de l'écrire a pu parfois permettre cette réconciliation. Ce qui est naïf de ma part évidemment c'est d'oublier que cela peut provoquer autre chose que ce sentiment chez les autres, voire que cela peut provoquer des conflits. Ce qui est naïf de ma part c'est aussi d'imaginer que mon propre regard sur moi soit juste. (ça me fait penser aux dépressifs qui disent, ouf, enfin ça va mieux, je sors du trou, juste avant de se suicider, ça me fait rire mais c'est pas très rigolo).
En tout cas j'ai l'impression que cela ne m'appartient plus que comme un texte parfois raté ou parfois réussi. Ce qui peut-être pire que tout quand on le relit plus tard mais ça c'est une autre histoire.
Bref comme dirait l'autre pitre: je est un autre, pitre.
Et alors?
Alors cet article, (STU), ne devait pas être une parenthèse et devait porter une fois de plus sur le Stu et s'appeler: "3+1= 2+2=4?"
Et j'arrive pas à l'écrire. Et je me rends compte que ce que j'ai à y raconter est trop intime au sens de "pas réconcilié", et je l'écrirai que lorsque ce le sera, ou lorsque j'aurai fait le tri entre ce que je pourrai dire et ce que je ne peux pas dire ou aurai trouvé une façon de le dire, d'inventer sûrement pour retrouver la réalité, peut-être.
Et évidemment, couillon, c'est d'autant plus compliqué qu'il s'agit de quatre intimités (celles de Manu, Christophe, Guillaume et Paul-André, ou alors pour ne pas simplifier les choses, celles d'ElJeton, Kinou, Andros et StPoli), qui fonctionnent souvent différemment, qui, par exemple, écrivent leur  vie au sommet du bouillonnement, ou uniquement dans la tension, ou en respirant à grandes goulées sur des hauteurs, ou vivement une bonne bouffée de gazoil, qui rient de ce qui m'énerve ou qui s'offusquent de ce qui me fait rire.
Et ça dépend des jours.
Et c'est très bien.

Bon, là, la thune pour le pédopsychiatre je la sors de ma poche et je dis pas le montant, de toute façon à trois ans on sait pas compter. Mais je la sors lentement, sexy, pervers, polymorphe.
En effet
PS1: les ordis de Poutsch et leurs utilisateurs, Jean-Christophe, Guillaume... étaient bien utiles et précieux pour la fabrications de CourtsEnragés.
PS2:Pour ceux qui au lieu de considérations fumeuses auraient voulu "de la pute et des cokes" dans cet article je peux à peine dire, pour les faire saliver, faire passer leur langue, les filles, sur leurs lèvres ourlées, que je ne sais pas encore si dans l'article "3+1=2+2=4?" je vais dire que dans le STU y'en a qui sautent de la voiture en marche avec assez d'adresse pour ne pas se blesser mais qui jettent leur bière -contenant et contenu- dans la tête des gens avec assez de maladresse pour choper le torse de la personne assise à côté... ou alors que d'autres se roulent des pelles hyper expressives pour exciter, picoter les filles vers lesquelles ils avancent.
PS3: Et n'allez surtout pas en déduire, les enfants, que parce qu'on est "réconcilié", tu parles, on doit dévoiler son intimité. On dit ce qu'on veut, on répond uniquement aux questions auxquelles on veut répondre, on résiste à la pression.