jeudi 31 juillet 2014

STU 2 le (du) JaegerMeister

Voilà l'autre débile de Booni qui m'envoie des capsules de bière dans la gueule. Et pourtant je l'aime et il m'aime. Comment cela a-t-il pu commencer?

C'est au O'Bundies - qui deviendrait quelques années plus tard La Salle Gueule, ça a peut-être peu d'intérêt de rapporter cette information mais ça me fait toujours plaisir d'utiliser le nom de La Salle Gueule, j'aime ce jeu de mot, il est bien.
Bon.
The Stu Ungar Story devait jouer au O'Bundies avec un autre groupe, ouvrir pour un autre groupe en fait, se greffer au concert de l'autre groupe, je ne me souviens plus de son nom:  Le Stu n'est pas toujours antipathique et autocentré, ne parle pas toujours de lui à la troisième personne mais n'a pas non plus toujours une excellente mémoire. Nicolas organisait le concert, il était présent et discutait avec tous les membres des groupes - qui étaient ses amis, qui étaient très sympathiques. Tout le monde était content.
Il y' avait du whisky, c'était extrêmement rare, dans le petit local derrière le bar, réservé aux concertistes -c'est bien d'utiliser le mot groupe une dizaine de fois mais faut varier un peu - et Guillaume n'avait pas le droit d'y toucher: une consommation immodérée d'alcool avant le concert le rendait arythmique, comme nous autres bien sûr, mais lui ça s'entendait plus, c'est le privilège des batteurs. C'est pour ça que, sage, il se servait d'énormes verres de coca, et qu'il traversait le bar, avançant, glorieux, vers nous, avec un sourire satisfait; ce soir il était un véritable nazi sur l'alcool, il ne buvait que du coca, tu vois Manu, ça le réveillerait, pas un goutte, même pas une bière... Il nous prenait à parti avec des grands gestes.
Au troisième coca il me faisait des clins d'oeil de plus en plus expressifs et j'abandonnais négligemment mes bières pour boire ses verres avec lui. Ils étaient de plus en plus forts, il y mettait de plus en plus de whisky et de moins en moins de coca et on éclatait de rire comme des gros cons super malins et heureux de leur bon tour, "Chuut" - alors que Manu, Christophe, Nico, tous, avaient bien compris qu'il buvait du whisky coca depuis une demi heure, et faisaient semblant de ne pas le voir. C'était drôle.
Une autre demi heure plus tard y'avait plus de whisky, tout le monde était ivre, moi j'étais bourré et Guillaume détruit. Je ne sais plus qui a commencé à échafauder une théorie comme quoi il fallait boire du JaegerMeister pour se remettre en forme. Nico a dit qu'il en avait une grande bouteille chez lui, qu'il avait sa voiture, qu'il était prêt à les prendre (voiture et Jaeger) mais qu'il fallait que quelqu'un l'accompagne car il ne voulait pas mourir seul.
On y est allé, on est revenu, on a bu la moitié de la bouteille de JaegerMeister et on a commencé le concert.
Pour jouer il faut descendre au sous-sol, c'était dégueulasse, on était dans un état dégueulasse - Guillaume un peu plus que les autres, peut-être.
Pas grand monde ne nous a suivi en bas, mais Loïc et Booni, si. (Loïc et Booni, batteur et guitariste de Menpenti le groupe qu'ils formaient avec Manu et Nico). C'était gentil. Ils avaient quatre ou cinq bières chacun dans les mains.
Le "concert": je crois que Guillaume a commencé en faisant une blague et en donnant volontairement un coup de baguette foireux sur son tom basse, et que  Manu dirait 24heures plus tard que c'était le seul moment juste, rythmiquement, de notre soirée, mais peut-être que j'exagère.
Quoi qu'il en soit au bout d'un quart d'heure et au quatrième morceau je sens des trucs qui me partent dans la tête ou sur les épaules, je lève les yeux de ma guitare en essayant de ne pas perdre le fil - pas facile à saisir ce soir là- et l'équilibre et je me prends une capsule de bière au milieu du front, je regarde autour de moi, il y a quelques capsules par terre. Booni ne vise pas toujours très bien, mais il me vise. Il me regarde, je le vois, je l'imagine, goguenard. A l'époque, et c'est toujours pareil, mon jeu de scène est basé sur l'immobilité et l'inexpressivité, une grande rigidité digne, le moindre mouvement est une mise en danger de toute façon; ce soir-là Manu et Christophe m'ont l'air presque, presque, au diapason, ils ont clairement trop bu, ils ne se meuvent pas, ils tanguent. Je commence à essayer d'engueuler Booni en le regardant méchamment et en bougeant mes lèvres de façon a dessiner des insultes, il continue. Je gueule et vu le niveau sonore, il n'entend rien, alors comme j'ai acheté un jack de 5 ou 6 mètres et que j'en suis très fier, je quitte l'estrade, je me jette sur lui et, tout en essayant de continuer de jouer ma partie, je lui donne des grands coups d'épaule dans le thorax. Comme j'ai ma guitare dans les mains, qu'il est plutôt grand, je ne peux pas faire autre chose. Il me ceinture, me dit, mais retourne jouer, espèce de débile, je rue vaguement et je m'exécute.
L'avantage c'est qu'après le concert, de retour dans le réduit mis à disposition des groupes, mes hurlements sur Booni et ses arguments sarcastiques - que viennent interrompre le déhanché de Guillaume qui n'arrive plus à marcher droit depuis longtemps mais qui continue de boire, comment fait-il? et qui balance d'une voix de stentor plutôt caractéristique à qui veut l'entendre "c'est l'histoire du rock n roll... nous assistons à l'histoire du rockn roll!" - nous permettent de remettre à plus tard une analyse -un constat amer et sans appel-  de notre prestation désastreuse.

Je précise simplement et démagogiquement qu'à côté de moi Loïc me disait, allez frappe-le, ça fait une semaine que j'ai envie de le faire mais je peux pas c'est mon guitariste, et que Booni me balançait des que si je n'existais pas, si je n'avais pas une certaine importance à ses yeux il ne m'aurait jamais jeté quoi que ce soit pendant le concert, que je devrais être flatté... ce à quoi je rétorquais que s'il n'existait pas, s'il n'avait pas une certaine importance à mes yeux je n'aurais jamais pris la peine de lui hurler dessus.

Et quarante euros dans la main du pédopsychiatre.

vendredi 25 juillet 2014

STU 1tro


Le 25 juillet 2014, dans mon placard, 950, à peu près, disques vinyles de Le STU.

Le STU
En 1996 je rencontre Manu.
En 1998 je rencontre Christophe et dans la foulée Christophe et Manu se rencontrent. Ils aiment beaucoup jouer au foot ensemble, que ce soit en short ou en slip.
En 2006 je rencontre Guillaume. Manu et Christophe ne détestent pas boire des vodkas dans le sous-sol qui donne sur le jardin sans lumière où il vit- que ce soit en écoutant Conflict ou Michel Sardou (Oui je sais ça devient un peu cool mais Guillaume est cool, c'est comme ça.)
A cette date nous sommes quatre et en 2009 nous "créons" un groupe de "rock": The Stu Ungar Story. On va au local 44 - hôtel de la musique, Capelette - on fait des morceaux et puis des concerts. Je répète à l'envi et à des sourires polis mais un peu indifférents que nous sommes le seul groupe punk de Marseille puisque Guillaume n'a jamais fait de batterie, que je n'ai jamais fait de guitare et que Christophe n'a jamais chanté. (Manu faisant déjà un peu tout ça plutôt pas mal, de la basse surtout, depuis longtemps, et dans d'autres groupes c'est évidemment le moins punk d'entre nous, mais il ne faut pas lui dire.)
En 2013 nous enregistrons un album et nous changeons de nom: Le STU.
Mais la date importante c'est 2012. En 2012 , un soir, je dis à Aurélien que vu le tour que prennent les choses depuis quelques années on devrait peut-être aller voir un psy avec les trois autres... Je lui explique pourquoi en lui racontant deux trois choses de notre quotidien de groupe, il me répond que peut-être un pédopsychiatre, ça serait mieux.
Il avait sûrement raison.
Au fait, je suis né en 1978, pour les autres je dis pas, c'est leur intimité, mec.